Dans la pensée scientifique, le recours aux modèles est aujourd’hui répandu, si ce n’est incontournable. Expression de cette cardinalité, Paul Valéry jugeait qu’il est impossible de raisonner et de communiquer sans l’aide de modèles (VALERY, 1975, p. 835). Leur mode de conception (leur modélisation) ainsi que leurs utilisations sont largement discutés en épistémologie. Mais il a fallu attendre le 20e siècle pour que les premières analyses les prenant pour objet soient formalisées. Ceci, à la faveur du recours croissant des mathématiques et de l’informatique dans l’ensemble des disciplines scientifiques et de la possibilité ainsi offerte aux chercheurs de les encoder de manière simplifiée et symbolique (V. notamment, BADIOU, 1969). Comme le suggère le sens commun, la notion de modèle est employée essentiellement à deux fins : représenter le réel par un effet de réduction, de simplification voire de stylisation facilitant sa compréhension, voire l’expérimentation (la figure du modèle réduit), mais aussi faire advenir la reproduction d’un objet ou d’un fait par un effet de mimétisme (la figure du modèle de l’artiste).
Dans le champ du droit, la notion de modèle reste encore assez peu interrogée. Sa présence est pourtant avérée. Les développements qui y sont notamment consacrés dans les ouvrages consacrés aux méthodes du droit en attestent (v. par ex. CHAMPEIL-DESPLATS, 2022). Il faut dire que l’outil est extrêmement fécond. Pour s’en convaincre, il suffit de se référer au champ lexical qui y est associé. Si l’on s’en tient au français, les mots pour le dire sont loin de manquer. Qu’il soit employé en guise d’adjectif ou de substantif, le modèle offre une palette de nuances aux chercheurs : archétype, canon, étalon, idéaltype, paradigme, parangon, prototype etc. A des fins de schématisation et sans prétendre à un exposé exhaustif des usages potentiels ou avérés de la notion de modèle en droit, l’on dira de lui qu’il est porteur d’une dualité fondamentale. En effet, il renvoie en premier lieu « à ce qui est, au Sein […] en ce sens, il est descriptif ». En second lieu, il « désigne ce qui doit être, le Sollen […] dans cet esprit, le modèle […] est un idéal, […] en ce sens, le modèle est aussi prescriptif » (MEKKI, 2005). Bien qu’évocatrice, cette distinction doit être relativisée, car ces deux dimensions sont inextricablement liées.
Modèle descriptif
Descriptif, le modèle est un outil qui est essentiellement mis au service de la connaissance. Dans ses usages, le modèle descriptif est multiple. Certains se recoupent, d’autres s’opposent.
Modèle idéel/matériel
Idéel, le modèle relève de la pensée et non du monde matériel. Parler de modèle idéel, c’est donc l’opposer au modèle physique ou matériel (AMSELEK, 1989 ; JEAMMAUD, 1990). Bien qu’il soit principalement question de modèles idéels en droit, les modèles matériels (les moules) n’y sont pas complètement étrangers et s’y développent. Pour s’en tenir à des fins d’illustration au seul droit du travail, ce sont des modèles d’instrumentum, d’actes juridiques, qui sont bien souvent commercialisés par des maisons d’édition et des professionnels du droit. Ils sont parfois le reflet des bonnes pratiques observées. De manière notable, ces modèles peuvent également être mis en place par les pouvoirs publics pour guider l’action privée. Le phénomène semble se développer. Que l’on songe aux modèles instaurés par voie règlementaire (v. par ex. décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017 instituant des modèles de lettre licenciement). Les partenaires sociaux en proposent également à destination des entreprises, invités en cela par le législateur (v. par ex. l’accord type d’intéressement négocié au niveau de la branche en vertu de l’article L. 3312-8 du Code du travail). Il s’agit de patrons, au sens artisanal du terme, qui permettent la reproduction à grande échelle d’un même dispositif. Attestant dans une certaine mesure d’une standardisation des actes juridiques et de l’automatisation de leur production, ces modèles interrogent quant à leur valeur juridique (LYON-CAEN, 2018, p. 1). En ce qu’ils orientent fortement les comportements en promettant à ceux qui s’y plient, à tort ou à raison, la sécurisation de leurs opérations juridiques, ces modèles peuvent être également considérés comme prescriptifs.
Modèle catégoriel/type
Catégoriel ou type, le modèle est un outil d’agencement du réel. Dans cet ordre d’idées et selon une première approche, l’on peut voir dans le modèle une catégorie. Cette dernière se définit comme un ensemble de caractéristiques auquel peuvent être rapportés des faits ou des objets. Ces caractéristiques générales permettent de penser l’objet (son « essence », sa nature, juridique il s’entend) indépendamment des cas particuliers. La modélisation passe alors par l’identification de la structure interne de la catégorie (sa définition). Concrètement, il s’agit de déterminer les conditions nécessaires et suffisantes (CNS) qui permettent de penser l’appartenance à la catégorie (sur le « modèle des CNS », v. NYCKEES, 1998, p. 300). Les énoncés normatifs regorgent de ces catégories « qui constituent des modèles de référence, des instruments d’évaluation permettant de qualifier des faits ou des concepts » (FROSSARD, 2000, p. 35). Ce sont des interfaces entre le fait et le droit qui guident les juristes, particulièrement les juges. En qualifiant les faits qui leur sont rapportés, les juristes les apparient aux catégories juridiques préexistantes.
L’approche catégorielle qui repose sur les préceptes de la logique aristotélicienne, est particulièrement adaptée à un mode de raisonnement binaire. Celui-ci postule que sur la base d’un seul critère, il n’est possible de concevoir un stade intermédiaire entre le fait de le satisfaire ou de ne pas le satisfaire (A ou non (A) est vraie pour toute proposition A). C’est le principe du tiers exclu. De ce fait, elle présente l’avantage d’être fort opérationnelle et est très largement répandue en droit où le diptyque légalité/illégalité structure le raisonnement. Toutefois, un usage moins rigide et peut-être plus savant de la notion de modèle, autorise à opérer des recoupements entre des faits et des objets qu’il s’agit moins d’opposer que de placer sur une échelle. On passe alors d’une « logique binaire (interrupteur ouvert ou fermé, lampe allumée ou éteinte) à [une] logique floue [qui] se traduit non pas par un changement de structure du circuit, mais par le remplacement des interrupteurs par des rhéostats, qui vont permettre de faire varier continûment l’intensité du courant électrique » (DELMAS MARTY et MATHIEU-IZORCHE, 2000, p.772). Le modèle renvoie alors au type (le modèle type) et aux typologies (classification des formes typiques d’une réalité complexe). On relève au moins trois usages potentiels de la notion de type en droit. D’une part, le modèle type peut être archétype. Il est alors considéré, selon une opinion partagée (idéalisante/intuitive ?) et au regard de différentes variables (ancienneté, fréquence des occurrences etc.), comme le représentant le plus remarquable d’un ensemble. Ainsi, il n’est pas rare que la notion de contrat soit pensée au travers de l’échange et plus spécialement de la figure du contrat de vente. L’identification d’un archétype exemplifiant fonde des raisonnements par extrapolation, l’un permettant de penser le tout. D’autre part, le modèle peut être prototype. Il constitue alors l’exemplaire le plus représentatif d’un ensemble en ce qu’il en réunit les propriétés considérées comme les plus saillantes et que l’on aura pris soin d’identifier préalablement. Cette identification n’obéit pas à des règles préétablies. Les traits saillants peuvent notamment être définis comme ceux qui sont communs à l’ensemble des cas que l’on estime relevant de l’ensemble. Ils sont susceptibles d’être discutés, d’être remis en cause et d’évoluer. C’est admettre que derrière l’unité du concept se cache une multitude de cas que l’on peut situer sur une échelle – une typologie – et qui présente des « ressemblances de famille » (WITTGENSTEIN, 2015). A titre d’exemple, on peut affirmer que l’accord collectif de travail est un bien meilleur prototype d’accord collectif que les accords interprofessionnels agricoles (FERKANE, 2017). Enfin, le modèle peut être idéaltype. L’idéaltype est une construction dont le statut n’est pas discuté : une représentation volontairement déformée et exagérée du réel. Il n’y a donc pas nécessairement de correspondance avec le réel. L’idéaltype a essentiellement une fonction heuristique. On l’obtient « en accentuant unilatéralement un ou plusieurs points de vue et en enchaînant une multitude de phénomènes donnés isolément, diffus et discrets, que l’on trouve tantôt en grand nombre, tantôt en petit nombre et par endroits pas du tout, qu’on ordonne selon les précédents points de vue choisis unilatéralement » (WEBER, 1965, p. 181). L’idéaltype est un instrument de la connaissance, voire une « stratégie » qui bien menée permet « d’accentuer la formulation par l’esprit de relations causales dont le chercheur soupçonne qu’elles peuvent se révéler décisives pour la compréhension et l’explication des faits soumis à sa sagacité » (LALLEMENT et LIMA, 2009, p. 379). A titre d’exemple, même si le statut prêté aux modèles ici évoqués est discutable, la célèbre typologie des Etats providence proposée par Gosta Esping-Andersen repose sur trois idéaltypes : le modèle social-démocrate, le modèle corporatiste-conservateur ainsi que le modèle libéral.
Modèle théorique/ systémique
Accoler les notions de modèle et de théorie peut sembler au premier abord inopportun tant un rapport de synonymie semble se nouer entre elles. Toutefois, on observe qu’à l’usage le modèle ne sera, bien souvent, qualifié de théorie que si son pouvoir explicatif (du réel) est majoritairement admis par la communauté scientifique. Le modèle théorique est construit par généralisation et simplification de l’objet d’étude, des données issues de l’« observation » qui s’y rapportent. La modélisation procède alors par élimination des données jugées négligeables et non significatives. Elle passe à la fois par une compréhension et une connaissance fine de l’objet modélisé (analyse) mais aussi par une représentation et une reconstruction de celui-ci (conception). Le modèle constitue en cela une déformation, plus ou moins assumée et à des degrés différents, de la réalité. Doté d’un fort pouvoir évocateur, le modèle théorique permet de réaliser une économie de langage appréciable. Identifié, esquissé et réduit à quelques traits saillants, il dispense de mobiliser à chaque fois que l’on s’y réfère, un appareil conceptuel parfois imposant. On y voit un « repère cognitif » qui comporte une « dimension explicative et pédagogique » (CHAMPEIL DESPLATS, 2022, p. 367).
Systémique, le modèle offre une représentation de la réalité observable comme étant un ensemble d’éléments en interaction, évoluant dans un environnement déterminé, destiné à satisfaire une ou plusieurs finalité(s) définie(s), structuré en fonction de cette (ou de ces) finalité(s), agissant sur son environnement, et se transformant avec le temps sans perdre pour autant son identité (GASSIN, 1981, pp. 353 et s). Ainsi, le modèle systémique ne porte pas sur objet isolé mais sur un ensemble d’objets ainsi que sur les relations que ces derniers entretiennent. Il s’agit d’une approche globalisante. Ces modèles systémiques sont très présents en droit comparé. Ils donnent même lieu à des enseignements dédiés lorsque sont comparés les « grands systèmes de droit ».
Qu’il soit théorique ou systémique, la construction du modèle pose des problèmes méthodologiques similaires. Si l’on s’accorde à considérer que les études de droit comparé, aussi bien externes qu’internes, sont des terres particulièrement fertiles pour l’éclosion de tels modèles (par ex. FAVOREU, 1986, p. 51), l’on peut s’attacher à décrire dans le détail la réflexion menée. Souhaite-t-on mettre en évidence des convergences ou des dissemblances entre les objets d’étude (méthode intégrative ou différentielle) ? A ce sujet, le modèle facilite la comparaison. En se conjuguant au pluriel, il permet de penser l’altérité. D’autre part, quelle est la temporalité de la comparaison (synchronique ou diachronique) ? Quel est l’espace de comparaison (par exemple, droit privé, droit public) ? In fine, quel est le but de la modélisation et de la comparaison (à des fins de connaissance, de prescription) ? Enfin, qu’est ce qui permet d’affirmer qu’un modèle est pertinent ? D’aucuns considèrent que ce sont les faits qui « fournissent un certificat de pertinence au modèle, par l’expérience et la vérification » (FRISON-ROCHE, 1995, p. 287). Autrement dit, la pertinence du modèle et de sa modélisation s’appréciera de manière empirique à l’aune de sa capacité à expliquer le réel observé. D’autres au contraire estiment que « plutôt que par la fausseté ou la vérité, l’exactitude ou l’inexactitude, les modèles s’apprécient par leur pertinence à remplir leur fonction, par la finesse ou grossièreté des caractéristiques qui leur sont conférées » (CHAMPEIL-DESPLATS, 2022). Tout dépend, sans doute, du statut que le modélisateur entend conférer à son modèle. En cela, toute modélisation gagnerait à être précédée d’un exposé des prétentions et de l’objectif poursuivi.
Modèle prescriptif
Prescriptif, le modèle est un outil mis au service de l’action.
Modèle normatif
Tout énoncé normatif est porteur d’un projet, celui d’orienter/de diriger la conduite de ses destinataires en leur « proposant » des ressources pour agir, autrement dit des modèles pour l’action (PARRAIN-VIAL, 1959, p. 132 ; JEAMMAUD, 1993, p. 207). Ce sont des « directives » (ROSS, 1968), c’est-à-dire des propositions linguistiques prescriptives qui signifient des commandements énoncés par des organes habilités (normes de compétence) dans le but de diriger la conduite des citoyens (normes de conduite). Cette fonction de la norme juridique renvoie à la racine même du mot modèle, le mode. Ce dernier est une forme particulière sous laquelle s’accomplit une action. La norme juridique a justement vocation à modeler l’action, à la façonner de manière plus ou moins contraignante. La norme peut être injonctive. Elle peut également être incitative et en cela porteuse d’un modèle vers lequel on souhaite que le destinataire de la norme tende de sa propre volonté. La norme juridique peut également être porteuse d’un anti-modèle ou d’un contre-modèle lorsqu’elle se fait supplétive. Le modèle peut être plus ou moins déterminé, plus ou moins souple. A ce titre, on peut admettre que les standards juridiques sont des modèles autorisant une meilleure individualisation de la norme, mais ceci au prix d’une plus grande indétermination de celle-ci. Ce sont des modèles au sens d’étalons de mesure « en termes de normalité » (RIALS, 1984, p. 42). On peut ainsi affirmer que la norme juridique prescrit ce qui doit être ou plutôt ce qui devrait être. A tel point que l’on peut considérer que dans ce cadre, « la conformité avec ce modèle est nommée ‘légalité’ » (Dictionnaire encyclopédique de théorie et de sociologie du droit, v° « Modèle », LGDJ). C’est pourquoi, l’on considérera que l’élaboration de ces modèles normatifs est essentiellement l’apanage de ceux qui sont habiliter à énoncer la norme juridique. Cela ne veut pas dire que la doctrine juridique ne s’autorise pas parfois à formuler, aux côtés des modèles théoriques ou systémiques, de véritables modèles à prétention normative. Il y a là un risque que certains auteurs pointent du doigt. Produits de la science du droit, les modèles théoriques ou systémiques ne sont que des vues sur le droit qui ne doivent pas se confondre avec le droit lui-même. Leur statut ne doit pas être ignoré. Sans vouloir dénigrer leur portée, ce ne sont que des constructions intellectuelles qu’il convient de ne pas essentialiser (V. par ex. les critiques formulées à l’encontre des modèles de justice constitutionnelle, TUSSEAU, 2009). Les réflexions sur la positivité de la théorie générale du contrat, parfois confondue avec le droit commun du contrat, se font l’écho de la place qu’il faut conférer à ces modèles d’essence doctrinale dans la pensée juridique (V. notamment SAVAUX, 1997).
Modèle idéal
C’est l’une des acceptions du modèle que l’intuition parvient le mieux à saisir. Celui-ci désigne l’idéal que l’on compose/propose en vue d’être admiré, voire imité à des fins d’excellence. La raison d’un tel jugement de valeur tient aux vertus qui sont prêtées à l’objet tenu pour modèle. Celles-ci correspondent à autant de traits qui le confinent, à tort ou à raison, dans une certaine image de la perfection. La modélisation, ici entendue comme élévation d’un objet au rang de modèle idéal, est alors le fruit d’un travail consistant à en extraire les éléments les plus dignes d’intérêt afin de les ériger en références à atteindre. C’est bien souvent l’expérience ainsi que les succès affichés par un modèle au regard des objectifs qui lui étaient assignés qui permettront de le qualifier d’idéal. L’on parle ainsi bien souvent du Code Napoléon comme un modèle qui a très largement été imité en dehors de la France. C’est « une œuvre législative dont la valeur exemplaire (en) fait une source d’inspiration en législation comparée » (CORNU, Vocabulaire juridique, PUF, Quadrige). Cette approche du modèle permet de mettre au jour la vocation circulatoire des modèles. On l’observe particulièrement dans les études de droit comparé où le modèle issu de tel ou tel pays, continent, voire lorsque la comparaison est interne, de telle ou telle branche du droit, est proposé à l’imitation. La circulation s’opère parfois par voie de contrainte. Elle peut aussi être volontaire. Mais cette circulation soulève certaines difficultés. La greffe ne prend pas toujours. La circulation d’un modèle implique une réflexion sur son adaptabilité et sur les prérequis qu’il convient de satisfaire pour que le transfert soit possible, voire un succès au vu de l’objectif que l’on s’est assigné (RIVERO, 1972, p. 619).
Modèle prédictif
Et demain ? Quel pourrait-être le nouvel usage des modèles en droit ? Longtemps perméable (réfractaire ?) à leur usage, le droit pourrait être une nouvelle terre d’élection des modèles formulées à l’aide des mathématiques et de l’outil informatique. La mise à disposition croissante au profit du public des décisions rendues par les juridictions judiciaires et administratives sous forme électronique (open data) ouvre la voie à un traitement systématisée de ces données au moyen d’algorithmes. A partir des données collectées et via une simulation, le modèle a alors vocation à déterminer les chances (une probabilité) de réalisation d’un événement, sachant que celui-ci s’est déjà produit par le passé. La pertinence du modèle s’appréciera alors à l’aune de sa capacité effective à anticiper l’événement. Dans le champ judiciaire, le modèle prédictif doit permettre, de manière plus ou moins efficace, de mieux anticiper le résultat d’une action en justice. Là encore, le modèle est pensé comme un guide pour l’action, une aide à la prise de décision. Mais faut-il nécessairement s’insurger contre l’aléa ? Toute action se pare de l’incertitude même si le droit s’accommode mal de cette insécurité. Il ne faudrait pas que le modèle prédictif tétanise des preneurs de décisions trop apeurés de s’écarter de la voie tracée par la multitude des précédents. Quelles places pour l’expérience personnelle et pour l’innovation dans cette configuration ? L’usage des modèles prédictifs dépasse le seul cadre de l’action en justice. Si l’on s’en tient aux relations de travail, il existe à présent des modèles prédictifs mis au service des recruteurs en quête du parfait salarié qui déterminent le « meilleur » candidat en les rapportant à un profil type élaboré à partir des données collectées auprès de salariés déjà présents dans l’entreprise et qui donnent entièrement satisfaction à l’employeur. On pressent, bien entendu, les dangers réels ou fantasmés de telles pratiques. Une régulation de l’usage de ces modèles est indispensable.
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Ylias Ferkane
Décembre 2022